D'un monde haut en couleurs, à un monde terne
Faisant écho aux années 1980, la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum a annoncé un plan agricole visant à renforcer la souveraineté alimentaire, en augmentant la production nationale d'aliments de base tels que les haricots et le maïs. Visant à réduire la dépendance à l'égard des importations et à promouvoir les aliments locaux essentiels à la culture mexicaine, l'initiative souligne un engagement à "produire ce que nous mangeons", s'alignant sur des objectifs plus larges d'autosuffisance alimentaire et de résilience économique. Pour en savoir plus sur ce programme, cliquez sur cette galerie !
Elle est populaire dans le monde entier, bien que nous ne pensons qu'aux tacos, au mole, aux enchiladas ou aux chiles farcis. Mais tous ces plats sont composés d'ingrédients traditionnels tels que le maïs, les haricots, les sauces complexes et les salsas.
Toutefois, si les éléments traditionnels de la cuisine mexicaine populaire ont fait le tour du monde, la façon dont les Mexicains s'alimentent ne reflète pas toujours leurs traditions. En effet, en raison de l'augmentation des coûts et des changements alimentaires influencés par la mondialisation et les importations internationales, le régime alimentaire mexicain s'est éloigné de bon nombre de ses produits de base.
Effectivement, AP News rapporte que les consommateurs se tournent de plus en plus vers le blé plutôt que vers les produits à base de maïs, suite à l'augmentation de 10 % en 2022 du prix des tortillas. En outre, alors que le pays possède l'un des meilleurs cafés du monde, de nombreux Mexicains ont abandonné le café en grains au profit du café instantané !
Une campagne menée depuis une dizaine d'années pour lutter contre l'augmentation des taux d'obésité (30 % des adolescents et des adultes seraient obèses au Mexique) a ciblé les snacks et les boissons sucrées bon marché vendus dans les magasins locaux et dans les écoles.
Malheureusement, les enfants mexicains ont le taux de consommation d'aliments transformés le plus élevé de toute l'Amérique latine. Les Nations unies considèrent les taux d'obésité infantile au Mexique comme une situation d'urgence ! En octobre 2024, de nouvelles mesures ont été mises en place pour réglementer l'achat et la consommation de malbouffe dans les écoles.
En effet, selon le gouvernement mexicain, les écoles ont six mois à partir d'octobre 2024 pour mettre en œuvre un plan interdisant totalement la malbouffe, sous peine de se voir infliger de lourdes amendes. Au moment de la prise de décision, la malbouffe était disponible dans 98 % des écoles !
Aussi, seulement 4 % des écoles offrent de l'eau potable gratuite à leurs élèves. Les boissons sucrées sont tristement l'une des boissons les plus consommées au Mexique. L'augmentation des taxes sur ces produits et l'apposition d'étiquettes d'avertissement font partie des politiques gouvernementales.
Près de 70 % des enfants mexicains consommeraient régulièrement des boissons sucrées, ainsi que des en-cas frits et sucrés ! Cela représente une grande partie de l'apport calorique des enfants. Compte tenu de l'augmentation des taux de diabète et d'hypertension chez les jeunes, le gouvernement s'inquiète de l'avenir de ses enfants...
Les efforts déployés pour réduire les taux croissants d'obésité et de maladies liées au poids n'ont pas encore eu d'impact significatif en termes de chiffres. Toutefois, la présidente du Mexique espère que le nouveau plan agricole du pays modifiera le comportement des consommateurs et aura des effets bénéfiques sur l'économie et la santé.
En octobre 2024, Claudia Sheinbaum s'est exprimé sur un nouveau plan agricole qui devrait avoir un impact significatif sur la façon dont les Mexicains s'alimentent, certains soulignant qu'il reprend des schémas du passé.
Dans les années 1980, la production et la distribution alimentaires du pays reflétaient certains des ingrédients classiques de la nation, tels que les tortillas de maïs, les haricots, le chocolat et le café. De nombreuses personnes comptaient sur les petits magasins gérés par le gouvernement qui fournissaient des produits nationaux à des prix accessibles.
La présidente souhaite dynamiser ces magasins locaux, y introduire des ingrédients traditionnels produits au Mexique et veiller à ce que les prix restent accessibles à la population mexicaine. Le concept de "produire ce que nous mangeons" vise donc à atteindre la souveraineté alimentaire en augmentant la production de haricots et de maïs.
Dans le cadre d'un programme d'incitation pour les agriculteurs, le secrétaire à l'agriculture Julio Berdegué a indiqué que ceux qui cultivent du maïs pour les tortillas recevraient des garanties de prix de la part du gouvernement.
C'est un autre domaine sur lequel le gouvernement mexicain se concentre. Alors que la majorité des haricots sont importés, le gouvernement du pays prévoit d'augmenter la production nationale de haricots de 30 % au cours des six prochaines années. Il mènera également des recherches afin d'identifier les haricots les plus productifs.
Toutefois, les critiques s'inquiètent du fait que les Mexicains ne reviendront pas aux habitudes alimentaires du passé. En effet, la consommation de haricots a diminué de moitié au cours des 40 dernières années, et celle des tortillas a chuté de 25 %. Réorienter le comportement des consommateurs en se basant uniquement sur les prix risque d'être une tâche ardue.
Le programme vise à accroître la production des petites et moyennes exploitations agricoles, en particulier dans les régions où le taux de pauvreté est élevé.
Le plan prévoit notamment de soutenir 2,02 millions d'agriculteurs, principalement pour la production de maïs, de haricots, de miel, de canne à sucre, de riz, de lait, de sorgho, d'oignons, de tomates, de piments, de café et de cacao.
Environ 1 200 municipalités à faibles revenus, où l'aide et la réforme sont désespérément nécessaires et bienvenues, font aussi l'objet d'une priorité de la part du gouvernement.
Comme dans le cas des prix garantis pour les agriculteurs qui produisent du maïs pour les tortillas, une partie du plan du gouvernement consiste à fournir l'assistance technique, l'assurance et le crédit nécessaires pour faire de ces chiffres une réalité.
Mais si l'économie alimentaire est au cœur de la politique de Claudia Sheinbaum, sa campagne présidentielle a également porté sur des questions telles que les concessions d'eau, la modernisation des techniques d'irrigation et l'amélioration de la CONAGUA, l'entité nationale chargée des services d'approvisionnement en eau.
Malheureusement, en raison du changement climatique, le Mexique est confronté à de graves problèmes de pénurie d'eau. En effet, les périodes prolongées de sécheresse et les vagues de chaleur ont aggravé les conditions déjà difficiles d'accès à l'eau. La présidente prévoit également de réformer la loi nationale sur l'eau, ce qui aura des répercussions directes sur les politiques agricoles.
Environ 80 % de l'eau du pays est consommée par les entreprises agricoles. La production de maïs, d'avocats, de soja, de café et de blé est à l'origine de cette importante consommation d'eau.
Le plan agricole mexicain devrait également inclure une interdiction de planter du maïs blanc transgénique. En effet, cette culture particulière a des effets sur la santé et la biodiversité.
Les sociétés agro-industrielles et les multinationales ont influencé la production alimentaire au cours des dernières décennies. Cette tendance mondiale a entraîné une augmentation des prix du pétrole et des denrées alimentaires, ce qui a eu un impact sur les régions particulièrement pauvres.
L'analyse des tendances de la production alimentaire mondiale, du commerce et de la transformation des choix alimentaires a un impact important sur des maladies telles que l'obésité et le diabète. L'approche des questions de production et d'accès à l'alimentation doit tenir compte des impacts socio-économiques.
Le plan mis en place par le gouvernement mexicain est donc conforme aux conclusions d'un certain nombre d'études qui demandent aux gouvernements d'examiner les causes multiples qui conduisent à une augmentation des maladies évitables.
Les études montrent que les politiques fondées sur le soutien à la production intérieure de denrées alimentaires, l'adoption et le soutien des options agricoles locales, le respect des contextes locaux et l'engagement dans ces processus selon une méthode durable mènent à la souveraineté alimentaire.
En permettant aux populations non seulement de contrôler mais aussi de déterminer les systèmes de production et le commerce des produits agricoles, ces programmes stratégiques abordent les problèmes à différents niveaux.
Sources: (AP News) (Cornell University) (CBS News) (International Institute of Social Studies) (Transnational Institute) (United Nations) (Global Trade Alert) (Agri-Pulse) (Reuters)
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