D'un monde haut en couleurs, à un monde terne
Des images de repas élégants, d’intérieurs impeccables et de pâtisseries fraîchement préparées font renaître une vision nostalgique de la domesticité. La tendance "tradwife" réunit ces femmes qui choisissent d’adopter des rôles traditionnels dans leur mariage, flirtant parfois avec le pastiche. Bien plus qu’un simple mode de vie, cette approche redéfinit l’économie domestique par une mise en scène travaillée, mariant l’idéal familial des années 1950 à une esthétique contemporaine.
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Enfant, jouer à papa et maman était presque un passage obligé. Derrière ces jeux innocents se cachaient pourtant des rôles bien tracés, reflétant dès le plus jeune âge ce que la société attendait de chacun une fois adulte.
Certaines femmes devaient même suivre des cours d'économie domestique, où elles apprenaient la cuisine, la couture et d’autres tâches destinées à les préparer à la vie de famille.
La tendance "tradwife", contraction de "épouse traditionnelle", a dominé les réseaux sociaux une grande partie de l’année 2024, remettant en lumière des idées et des attentes que beaucoup de femmes jugent aujourd’hui dépassées.
Pourtant, cette tendance a contribué à raviver l’attrait de ces attentes, surtout dans le cadre des mariages et des relations hétérosexuelles.
Dans cette vision, le rôle des femmes se résume à des activités comme la pâtisserie, la cuisine, le ménage et la couture, des savoir-faire que l’on nous enseignait autrefois dans le cadre de l’économie domestique.
Bien que ces compétences puissent aussi être perçues comme des passe-temps, dans la tendance tradwife, elles sont vues comme le complément au rôle de soutien financier des maris.
Dans cette optique, une femme, ou une épouse dans le cadre du mariage, endosse les rôles traditionnels des femmes, centrés sur l'entretien du foyer à travers des tâches domestiques et les soins à la famille.
L’analyse de la version contemporaine de cette tendance révèle une dimension de servitude profondément ancrée dans sa pratique. Les images choisies illustrent des vies idéalisées.
Des enfants souriants savourent du pain au levain maison dans une cuisine impeccablement rangée, sans télévision à l'horizon, tandis que la femme, en arrière-plan, rayonne de fierté pour sa contribution à la vie familiale.
Il n’y a bien sûr rien de mal à préparer des repas faits maison, à réduire le temps d’écran des enfants, ou à suivre d’autres principes montrés dans ces images.
Les mères au foyer, un rôle respectable que certaines femmes choisissent d'adopter, ne sont pas non plus visées par la critique de cette tendance.
Les critiques se concentrent plutôt sur la glorification du rôle traditionnel des femmes, à travers cette représentation soignée diffusée sur les réseaux sociaux.
D'après le magazine Parents, Hannah Neelemen est à l'origine de cette tendance. Ancienne ballerine formée à l'école Juilliard, elle a renoncé à son rêve de devenir danseuse professionnelle après avoir rencontré son mari.
Hannah Neeleman a ensuite été couronnée Mrs. America 2023. Elle et son mari ont huit enfants et vivent dans une ferme de l'Utah.
Hannah Neeleman est une influenceuse de premier plan, qui embrasse les normes de beauté traditionnelles et partage des clichés d’une vie familiale parfaite, remplie "d’activités saines, loin des écrans".
Cependant, ses abonnés ont relevé un détail qui facilite la vie d'Hannah Neeleman : son mari, Daniel, est le fils du propriétaire de JetBlue, ainsi que de cinq autres compagnies aériennes.
La cuisinière de Hannah Neeleman coûte à elle seule 30 000 dollars, un montant supérieur au salaire annuel de nombreuses Américaines travaillant à plein temps.
Le magazine Parents souligne la différence entre une tradwife et une mère au foyer, deux termes qui ont été utilisés à tort de manière interchangeable.
Le rôle de mère au foyer est souvent une étape temporaire, adoptée par certaines mères, parfois faute d’accès à des solutions de garde adaptées et abordables.
Les tradwives s'engagent à suivre les rôles traditionnels des femmes de manière très précise, souvent en brisant l'équilibre inégal des tâches domestiques.
La tendance tradwife contraste avec les idéaux féministes modernes, qui visent à instaurer un meilleur équilibre dans les responsabilités et les rôles entre les hommes et les femmes.
La tendance tradwife reste relativement marginale, en grande partie à cause des idéaux féministes déjà profondément ancrés dans la société, notamment en ce qui concerne les rôles des hommes et des femmes.
Cependant, l'attrait de cette pratique réside dans l'idée d'une vie sans tracas pour ces femmes, les tradwives étant financièrement soutenues par leurs maris.
L'un des principaux défis de cet idéal réside, bien sûr, dans la dépendance financière au mari, une question régulièrement soulignée par les mouvements féministes au fil des décennies.
La plupart des ménages américains ne peuvent pas satisfaire leurs besoins financiers avec un seul salaire, en raison de l'augmentation du coût de la vie et des frais liés à la garde des enfants.
De plus, les mariages peuvent connaître des revers. Une séparation inattendue peut laisser une femme vulnérable, sans ressources financières ni moyens de subsistance.
Cette question constitue un enjeu historique pour l'émancipation des femmes, car nombre d'entre elles se sont retrouvées piégées dans des relations abusives, sans ressources pour en sortir.
Des imprévus peuvent surgir à tout moment, sans crier gare. Pour certains, l'attrait de la tendance tradwife, avec son idéal de vie familiale, peut sembler une option séduisante.
Cependant, ces circonstances peuvent évoluer, et il est essentiel que les femmes soient prêtes à faire face aux défis qui se présentent, sans risquer de se retrouver sans abri ou dans des situations précaires.
Sources : (Parents) (The New Yorker) (The Guardian)
Voir aussi : Qu'est-ce qui fait un bon parent ?
Le retour de la "Tradwife" : entre traditions et convictions
D'où vient ce fantasme de la domesticité ?
LIFESTYLE Tradition
Des images de repas élégants, d’intérieurs impeccables et de pâtisseries fraîchement préparées font renaître une vision nostalgique de la domesticité. La tendance "tradwife" réunit ces femmes qui choisissent d’adopter des rôles traditionnels dans leur mariage, flirtant parfois avec le pastiche. Bien plus qu’un simple mode de vie, cette approche redéfinit l’économie domestique par une mise en scène travaillée, mariant l’idéal familial des années 1950 à une esthétique contemporaine.
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