Cela peut choquer, mais le droit international permet parfois la mort de civils en temps de guerre. Bien que cibler délibérément des civils soit un crime de guerre et que le droit international vise à protéger clairement les non-combattants durant les conflits, il existe des situations où la mort de civils est considérée comme admissible.Dans quels contextes le meurtre de civils est-il permis ? Quelles lois encadrent cette pratique ? Découvrez les réponses en cliquant sur cette galerie.
Le droit international humanitaire (DIH) établit des règles pratiques pour réduire les destructions et les pertes humaines en temps de guerre. Toutefois, il ne prohibe ni les conflits armés ni les pertes civiles, mais cherche plutôt à encadrer la manière dont la guerre est conduite en imposant des limites.
Comme tout cadre réglementaire, le DIH est ouvert à l'interprétation et s'applique souvent au cas par cas, en tenant compte des circonstances spécifiques, plutôt que d'offrir des règles universelles et absolues.
Les groupes armés, qu'ils soient étatiques ou non étatiques, peuvent exploiter les zones d'ambiguïté du DIH pour développer des stratégies leur permettant de contourner les accusations de crimes de guerre, tout en limitant les atteintes directes à la vie humaine.
La règle de distinction est un principe clé qui impose aux groupes armés de différencier clairement leurs forces et leurs actions des civils ainsi que des biens civils ou publics.
Ce principe a pour objectif de clarifier qui et quoi est ciblé. Il exige que les combattants soient reconnaissables par leurs adversaires.
Cela a soulevé de nombreux défis stratégiques dans les contextes de guerre asymétrique, où certains conflits opposent des États à des acteurs non étatiques.
Il n'existe pas de ligne directrice claire pour ces situations, car les signataires du DIH préfèrent éviter de légitimer le rôle des acteurs non étatiques dans les combats contre les forces gouvernementales.
Le principe de distinction stipule que le DIH ne peut être appliqué correctement que si les civils ne participent pas activement au conflit armé ni ne sont impliqués dans des attaques.
La situation devient plus complexe avec l'augmentation de ce que le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) désigne comme la "civilianisation" des conflits armés.
Tout comme dans l'exemple précédent, où le conflit ne met pas en présence deux armées nationales, l'ensemble de la population civile peut être perçu comme un groupe armé.
Toute implication des civils dans les combats, qui dépend d'une interprétation floue de ce que cette implication peut signifier, les dépouille de leur droit à la protection offerte par le DIH. Les organisations internationales ont donc appelé à une clarification de cette lacune.
Le conflit israélo-palestinien constitue un exemple pertinent pour explorer les complexités de cette problématique. Selon le droit international, les territoires palestiniens sont considérés comme étant sous occupation.
À bien des égards, les Palestiniens vivent sous la domination israélienne et peuvent donc être perçus comme des citoyens non reconnus de l'État d'Israël.
Cette situation est encore exacerbée par les différents niveaux de citoyenneté établis par le droit israélien. Par exemple, les Palestiniens vivant à Jérusalem, que l'État d'Israël considère comme une partie intégrante de son territoire, ont une désignation particulière.
Les Palestiniens qui habitent à Jérusalem ne sont pas considérés comme des citoyens à part entière, mais plutôt comme des habitants d'Israël bénéficiant de certains privilèges et de certaines conditions.
À Gaza, cette désignation inclut un autre aspect important. Bien que Gaza soit toujours qualifiée de territoire occupé, il est à noter qu'il n'y avait plus de présence physique permanente de l'État israélien dans la bande de Gaza depuis 2005, jusqu'au début de la guerre qui a éclaté après les événements du 7 octobre.
Bien que Gaza soit soumise à un blocus imposé par Israël et l'Égypte, Israël n'y a pas les mêmes obligations qu'en Cisjordanie, par exemple, en raison de l'absence de présence permanente dans la bande de Gaza.
Gaza n'est pas considéré par le CICR comme étant sous une occupation belligérante. Cependant, en raison de ses conditions particulières, Israël a certaines obligations qu'il doit respecter.
En raison de cette distinction, le droit international peut s'appliquer à Gaza, car ses habitants peuvent être considérés comme des parties étrangères.
La complexité liée à la classification des populations sous occupation rend également difficile l'application du droit international. En effet, ce dernier n'est pas conçu pour réglementer ou diriger les relations entre un État et ses citoyens.
La notion de civil protégé désigne les droits d'une personne qui n'est pas citoyenne de l'État qui la détient, qui la considère comme un prisonnier de guerre ou qui lui a causé du tort.
Tout en mettant en avant la complexité des contextes d'occupation, le CICR réaffirme que l'objectif du droit international n'est pas d'être appliqué aux acteurs locaux.
Cette conclusion complique les démarches juridiques des Palestiniens cherchant des solutions par le biais du droit international, tout en posant des défis à l'État israélien, qui tente d'appliquer certains aspects de ce même droit à ceux qu'il considère comme des menaces pour sa sécurité.
Le principe de distinction est également compliqué par la présence d'entités de sécurité privées, dont certaines sont militarisées. Dans ce contexte, les frontières deviennent encore plus floues lorsqu'il s'agit de déterminer qui peut être considéré comme un véritable combattant dans un conflit armé.
Le principe de distinction en droit international est étroitement lié au principe de proportionnalité. Ce dernier stipule que même en cas d'objectif militaire légitime entraînant des pertes civiles, le nombre de civils tués ne doit pas être excessif.
La définition de ce qui constitue un nombre excessif de morts civiles est, encore une fois, sujette à interprétation. D'un point de vue civil, une seule victime peut être considérée comme inacceptable, tandis que d'un point de vue militaire, la mort de civils peut être perçue comme une conséquence nécessaire pour affaiblir un adversaire.
La proportionnalité est, en quelque sorte, un principe qui favorise l'équilibre. Elle peut, d'une certaine manière, justifier des actes violents répétés en s'appuyant sur des calculs qui mettent en avant la modération.
Eyal Weizman, directeur de l'institut de recherche Forensic Architecture, souligne que le DIH, tout comme les droits de l'homme et les principes humanitaires, peut être abusé par les États et les acteurs militaires.
Eyal Weizman souligne par ailleurs que le DIH peut fournir des mécanismes permettant de calculer la violence, dans le but de la réduire et de la justifier comme un moindre mal.
En conclusion, bien que les règles de la guerre et la légalité des pertes civiles selon le droit international humanitaire puissent choquer certains, elles constituent le modus operandi des conflits contemporains.
Sources : (E-International Relations) (Oxford Academic) (ICRC) (Frontiers) (Human Rights Watch) (King’s College London) (ICC) (NPR) (UNRIC) (Theory, Culture & Society)
Voir aussi : Guerre de Gaza : l'effondrement économique après un an de guerre
Droit international : la mort de civils en temps de guerre est-elle admissible ?
La mort de civils en temps de guerre est parfois admise...
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Cela peut choquer, mais le droit international permet parfois la mort de civils en temps de guerre. Bien que cibler délibérément des civils soit un crime de guerre et que le droit international vise à protéger clairement les non-combattants durant les conflits, il existe des situations où la mort de civils est considérée comme admissible.
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