D'un monde haut en couleurs, à un monde terne
Pourquoi la qualité des choses que nous achetons aujourd'hui est plus faible que par le passé ? Pourquoi nos jeans se déchirent au bout d'une saison ? Pourquoi les machines à laver fonctionnent mal au bout de quelques années ? Ou encore, pourquoi nos téléphones semblent conçus pour devenir obsolètes ? En réalité, chaque achat cache une histoire...
Sous l'attrait de la mode rapide et de l'innovation technologique se cache un cycle de commodité, de gaspillage et de biens souvent irréparables. Nous sommes encouragés à remplacer plutôt qu'à restaurer, à courir après le nouveau plutôt qu'à valoriser le durable.
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Depuis plusieurs années, de nombreux produits (dont les téléphones portables, les ordinateurs et les vêtements) tombent en panne plus tôt que prévu. Et en tant que société, nous devons nous interroger sur ce qui se passe et nous demander si nous pouvons nous sortir de l'engrenage des déchets de consommation qui ne cessent de s'accumuler.
Lorsqu'ils créent un produit, les fabricants se concentrent traditionnellement sur trois aspects : la fonctionnalité, l'apparence et la facilité de fabrication. Ces facteurs sont censés être équilibrés, mais des changements récents dans la fabrication ont modifié cet équilibre.
L'habillement est un très bon exemple de ces changements. En effet, alors que les gens payaient autrefois pour des vêtements sur mesure, la production de masse et les achats en ligne sont devenus la norme, ce qui a réduit l'importance accordée à la durabilité et à la qualité au profit de la commodité et du faible coût.
Avec l'accès facile aux achats en ligne, les gens achètent des produits de façon plus régulière. Ces achats fréquents reflètent un changement non seulement dans les habitudes d'achat, mais aussi dans les attentes des gens en ce qui concerne la durée de vie et la qualité des produits.
Le publicitaire américain Earnest Elmo Calkins a créé l'idée de l'"ingénierie de la consommation" dans les années 1930, qui introduisait l'idée qu'il fallait encourager les gens à acheter fréquemment en faisant en sorte que les produits se démodent rapidement.
Il a en fait jeté les bases de ce que nous appelons aujourd'hui "l'obsolescence programmée", selon laquelle les produits sont délibérément conçus pour tomber en panne après une courte période.
En plus de leur dégradation physique, de nombreux produits sont également remplacés en raison de l'évolution des tendances. En effet, l'attrait de la "nouveauté" est ce qui nous pousse à acheter constamment. Il s'agit d'un comportement qui a été cultivé au fil des décennies, en particulier dans l'industrie de la mode.
Ils sont souvent axés sur des publics de niche et évoluent rapidement. Certaines marques ont même opté pour un changement de nom pour toucher un public plus jeune et plus spécifique.
Une enquête a révélé que près de la moitié des consommateurs américains achètent des vêtements tous les mois, et les Nations unies indiquent que la consommation moyenne de vêtements a augmenté de 60 % entre 2000 et 2014 ! Sachant que chaque article est conservé deux fois moins longtemps qu'auparavant...
Le fait que les consommateurs cherchent à économiser de l'argent a conduit à une demande d'articles moins chers. Ainsi, les fabricants ont été contraints de réduire leurs coûts, ce qui se traduit souvent par l'utilisation de matériaux de moindre qualité et par des raccourcis dans la fabrication.
Pour répondre à la demande en hausse, les entreprises peuvent faire des économies en choisissant des matériaux moins chers ou en simplifiant la conception. Il peut s'agir d'utiliser des matériaux synthétiques plutôt que des matériaux naturels ou d'opter pour des coutures moins durables.
Et oui, si les prix de nombreux articles n'ont pas beaucoup augmenté, l'inflation, elle, a progressé ! Effectivement, pour qu'un produit reste abordable, il faut souvent que quelque chose change. En général, la qualité des matériaux ou les normes de fabrication sont modifiées, ce qui se traduit par des produits qui durent moins longtemps.
Au tout départ, lorsque les premiers outils de technologie personnelle sont sortis, chaque nouvel appareil représentait une avancée majeure. Il était donc logique de les remplacer fréquemment. Cependant, les progrès technologiques ont ralenti, mais le cycle de remplacement persiste...
Les fabricants d'appareils électroniques font souvent en sorte qu'il soit incroyablement difficile pour les consommateurs de réparer ou d'entretenir leurs produits de manière indépendante. En effet, ils le font en concevant délibérément les produits de manière à ce que les consommateurs ne puissent pas les comprendre.
Les appareils modernes contiennent des technologies complexes telles que des puces et des circuits imprimés, ce qui les rend difficiles à réparer sans l'aide du fabricant. Certaines entreprises restreignent même l'accès aux outils et pièces de réparation essentiels, laissant les consommateurs totalement dépendants.
Il faut savoir que de nombreux articles modernes sont également créés sans tenir compte de leur possibilité de réparation. Au lieu de métal et de vis, les fabricants peuvent utiliser du plastique et de la colle, ce qui augmente le risque de casse et rend les objets plus difficiles à réparer.
Comme de plus en plus d'objets de la vie courante comportent des composants électroniques complexes, il devient plus difficile de les réparer sans outils spécialisés. Cette tendance a malheureusement entraîné une forte augmentation des déchets électroniques et de la dépendance à l'égard des fabricants.
Outre le gaspillage environnemental, l'absence d'options de réparation signifie également que les consommateurs doivent souvent remplacer les articles plus fréquemment, ce qui leur coûte beaucoup plus cher à long terme...
Des organisations telles que Repair Cafe visent à donner aux consommateurs le droit de réparer leurs produits. Il s'agit notamment de faciliter l'accès aux pièces, aux outils et aux instructions.
Malgré les défis auxquels ils font face, les consommateurs ont en réalité beaucoup plus de contrôle qu'ils ne le pensent. En effet, ils peuvent commencer à changer les choses simplement en optant pour la qualité et la longévité plutôt que pour des tendances éphémères et des articles jetables.
En 2022, l'État de New York a adopté la toute première loi sur le droit à la réparation, qui permet aux consommateurs d'accéder plus facilement aux pièces détachées et aux instructions de réparation.
De plus, les consommateurs peuvent également freiner le cycle de la consommation rapide en évitant la fast fashion et les micro-tendances. En achetant dans un but précis et en prenant soin de leurs articles, les consommateurs peuvent prolonger la durée de vie de leurs biens et réduire les déchets environnementaux.
Le fait d'apprendre à prendre soin de ses affaires (comme suivre les étiquettes d'entretien sur les vêtements) permet d'améliorer la durabilité et de prévenir l'usure prématurée. Adopter un état d'esprit de "maintenance" peut conduire à des remplacements moins fréquents et à la fin du gaspillage.
C'est un fait, l'abondance d'articles bon marché et éphémères oblige les consommateurs à faire preuve de plus de discernement. En choisissant la qualité plutôt que la quantité, ils peuvent adopter des habitudes durables et créer une demande pour des produits qui durent plus longtemps.
Notez qu'il n'est pas nécessaire de changer radicalement ses habitudes de consommation. En effet, des mesures simples, comme l'évaluation des besoins avant l'achat, peuvent contribuer à réorienter les priorités vers la qualité et à réduire la dépendance à l'égard d'articles bon marché et jetables.
L'un des aspects les plus importants de l'achat d'un vêtement est de savoir de quelle matière il est fait. Soyez donc vigilent. Si l'étiquette d'une chemise n'indique pas la composition du tissu, c'est un signal d'alarme immédiat !
Réparer des objets anciens, afin de les transmettre d'une génération à l'autre (comme les robots de cuisine), peut susciter des sentiments lorsqu'ils sont transmis. Il faut dire que ces biens ont une valeur émotionnelle bien plus importante que les produits bon marché achetés sur un coup de tête.
Lorsqu'il s'agit des produits que les consommateurs achètent, la seule limite qu'ils ont est leur propre volonté. En fin de compte, les produits sont censés être faits pour les gens, pas pour les fabricants, et les consommateurs doivent donc savoir clairement ce qu'ils veulent.
Sources: (Vox) (MIT Libraries) (United Nations Environment Programme) (The Repair Association)
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